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Poètes du temps passé


Sur cette page, vous trouverez une sélection de poèmes.

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12 Sur la mort de Marie....

Par Ronsard Pierre de

Sur la mort de Marie (extraits)

…Ainsi, en ta première et jeune nouveauté,
Quand la terre et le ciel honoraient ta beauté,
La Parque t’a tuée, et cendre tu reposes.

Pour obsèques reçois mes larmes et mes pleurs ;
Ce vase plein de lait, ce panier plein de fleurs,
Afin que vif et mort ton corps ne soit que roses.


Sonnets pour Hélène
I


Otez votre beauté, ôtez votre jeunesse,
Otez ces rares dons que vous tenez des cieux,
Otez ce docte esprit, ôtez-moi ces beaux yeux,
Cet aller, ce parler digne d’une déesse.

Je ne vous serai plus d’une importune presse,
Fâcheux comme je suis ; vos dons si précieux
Me font, en les voyant, devenir furieux,
Et par le désespoir l’âme prend hardiesse.

Pour ce, si quelquefois je vous touche la main,
Par courroux votre teint n’en doit devenir blême ;
Je suis fol, ma raison n’obéit plus au frein,

Tant je suis agité d’une fureur extrême ;
Ne prenez, s’il vous plait, mon offense à dédain ;
Mais, douce, pardonnez mes fautes à vous-même.


Sonnets pour Hélène
II


« Il ne faut s’ébahir, disaient ces bons vieillards,
Dessus le mur troyen, voyant passer Hélène,
Si pour tant de beauté nous souffrons tant de peine :
Notre mal ne vaut pas un seul de ses regards.

Toutefois il vaut mieux, pour n’irriter point Mars,
La rendre à son époux, afin qu’il la ramène,
Que voir de tant de sang notre campagne pleine,
Notre havre gagné, l’assaut à nos remparts. »

Pères, il ne fallait, à qui la force tremble,
Par un mauvais conseil les jeunes retarder ;
Mais, et jeunes et vieux, vous deviez tous ensemble

Et le corps et les biens pour elle hasarder.
Ménélas fut bien sage et Pâris, ce me semble,
L’un de la demander, l’autre de la garder.


Sonnets pour Hélène
III


Quand vous serez bien vieille, au soir à la chandelle,
Assise auprès du feu, dévidant et filant,
Direz, chantant mes vers, en vous émerveillant :
« Ronsard me célébrait du temps que j’étais belle. »

Lors vous n’aurez servante oyant telle nouvelle,
Déjà sous le labeur à demi sommeillant,
Qui au bruit de Ronsard ne s’aille réveillant,
Bénissant votre nom de louange immortelle.

Je serai sous la terre, et fantôme sans os
Par les ombres myrteux je prendrai mon repos :
Vous serez au foyer une vieille accroupie,

Regrettant mon amour et votre fier dédain.
Vivez, si m’en croyez, n’attendez à demain :
Cueillez dès aujourd’hui les roses de la vie.


Sonnets pour Hélène
IV


Afin que ton honneur coule parmi la plaine
Avant qu’il monte au Ciel engravé dans un pin,
Invoquant tous les Dieux et répandant du vin,
Je consacre à ton nom cette belle fontaine.

Pasteurs, que vos troupeaux frisés de blanche laine
Ne paissent à ces bords : y fleurisse le thym,
Et la fleur, dont le maître eut si mauvais destin,
Et soit dite à jamais la fontaine d’Hélène.

Le passant en été s’y puisse reposer,
Et assis dessus l’herbe à l’ombre composer
Mille chansons d’Hélène, et de moi lui souvienne.

Quiconques en boira, qu’amoureux il devienne,
Et puisse en la humant une flamme puiser
Aussi chaude qu’au cœur je sens chaude la mienne.